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L’Humain … en tenaille entre le Temps et l’Endroit ? *

14 Octobre 2025 , Rédigé par Alex Caire

 

Une question brûlante taraude l’esprit de l’homme depuis l’aube de la vie. Sa finitude. 

Depuis Socrate et son disciple Platon au berceau de la pensée dans la Grèce antique jusqu’à Schopenhauer, Heidegger et Nietzsche, Camus, Foucault, Morin en Europe en passant par Ibn Khaldoun en Tunisie, Ibn Arabi à Murcie et Ibn Roshd (Averoes)en Andalousie, à l’âge d’or du concordat des cultures et des religions jusqu’à l’avènement de l’IA, les humains n’ont eu de cesse, comme l’a  lucidement établi le bilingue hispanophone Michel Del Castillo, d’intercéder des livres entre eux et le néant. 

L’Homme à travers les âges offre plutôt l’image d’un mutin entêté en train de se cogner la tête contre deux murs: le Temps et l’Endroit. D’autres, esthètes, ont choisi d’évoquer l’Endroit tout en dialoguant avec le Temps en essayant de trouver une réponse à notre finitude au regard de l’infinitude du Temps et de l’Endroit, qu’il soit la première ou la dernière demeure. 

Le Coran n’a-t-il pas signifié qu’aucune âme ne saura dans quelle terre gagnera-t-elle sa vie ni dans quelle terre elle périra ?  (D’après la Sourate Loqmane, Verset 34)

Personne n’a pu autant reflété le passage du temps et la pérennité des endroits, celui de nos vies, nous les êtres mobiles, que Marcel Proust qui croyait revivre son Temps retrouvé vers le crépuscule de sa vie…

J’ai toujours accordé une grande importance aux lieux qui, contrairement aux humains, sont perpétuels. Le temps nous traverse dans un éclair pour continuer son voyage perpétuel vers un infini qu’aucun humain n’a su définir. J’ai choisi depuis quelque temps d’appréhender notre furtive et ô combien futile existence face à l’immense solitude du temps, tout en essayant de célébrer, faudrait-il bien une quelconque consolation, le temps perpétuel propre à chacun de nous, voire mon propre temps perpétuel. Avec l’écoulement du temps, surtout les moments de bonheur qui s’empressent de partir, je fus toujours heurté par cet indicible lien qui lie l’Art dans son accomplissement à la Beauté que l’Humain  essaie de recréer pour se perpétuer dans le temps infini; comme quoi Michel Del Castillo n’a jamais été plus juste qu'en affirmant que depuis les pyramides, les hommes n’ont de cesse de dresser des livres entre eux et la mort. Je me suis alors persuadé que goûter à l’Art ou le concevoir sous le prisme de la beauté me permettra de vivre ou de revivre ce que j’ai de plus précieux: le temps. Je dois néanmoins avouer que le concept de la Beauté est devenu une denrée si rare à notre époque défigurée par la bêtise, la vulgarité et l’avidité. Une époque malade d’une morbide métamorphose érigée en principe de survie. Nous sommes sommés d'évoluer, de changer, de s’adapter, toujours s’adapter, à tout prix, suivant le diktat d’un présent pressé où nous sommes tous devenus des étrangers les uns aux autres, tout en prétendant le contraire.

Vient alors le rôle des lieux dans une vie. Nous serons toujours marqués par des lieux qui nous sont aveugles, sourds mais jamais muets. Nous sommes nés pour être marqués par des lieux qui nous donnent des bribes de savoir, à commencer par celui de notre finitude. Quant à nous, nous passons d'une dimension à une autre et nous ne donnons rien ou presque.

 

L’Humain … en tenaille entre le Temps et l’Endroit ? *

 

Une fois entouré par l’indicible beauté des jardins andalous du Généralife, à Grenade, un miracle se produit, quand l’ombre vient atténuer les dernières empreintes du soleil sur le jaillissement perpétuel de l’eau, rythmé par le silence de l'instant, ce non-temps indéfinissable, dans ce paradis figé dans l'esprit des humains, cernés, eux, par la finitude. La beauté, quant à elle, est infinie. Elle transcende toute description. Perpétuelle, elle poursuit son voyage dans son propre temps perpétuel….

Et si Baudelaire avait raison de dire que la « Poésie est ce qu’il y a de plus réel, c’est ce qui n’est complètement vrai que dans un autre monde ».


Le temps navigue **

Le temps m’embarque dans un élan 
Qui anticipe vainement les limites du temps;

Des heures passent …

Je me languis de ta présence, 
Tel un fil d’eau qui s’ennuie 
Dans la solitude du soir.

Aucun silence,  
Aucune beauté
N’atténue le désarroi de l’absence;

Que le temps passe 
Ou ne passe,
Rien après toi 
Ne limite le voyage dans l’endroit.

Que tu sois proche ou loin,
Comment la nuit peut-elle se rendre 
Sans le sommeil des violettes dans tes paupières ?

Et quand le voyage s’arrêterait-il 
Pour te retrouver, 
Parcourant le temps à m’attendre?

Que le temps passe 
Ou ne passe, 
Personne après toi 
Ne limite le voyage dans l’endroit.

————
*Extrait 
Le Temps perpétuel 
Alex Caire-2025

**Extrait 
Sérail 
Alex Caire 
Horus Éditeur -2010
Société des écrivains- 2011

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